vendredi 16 avril 2010

"Nous aurons facilement raison du nouveau César..." (Le Comité central des Corporations, 1851)

Le bivouac du 4 décembre 1851, dessin paru dans : Taxile DELORD, Histoire illustrée du Second Empire, t. I. (1892)


« Aux travailleurs.

Citoyens et compagnons !

Le pacte social est brisé !

Une majorité royaliste, de concert avec Louis-Napoléon, a violé la Constitution le 13 mai 1850. Malgré la grandeur de cet outrage, nous attendions, pour en obtenir l’éclatante réparation, l’élection général de 1852. Mais hier, celui qui fut président de la république a effacé cette date solennelle. Sous prétexte de restituer au peuple un droit que nul ne peut lui ravir, il veut, en réalité, le placer sous une dictature militaire.

Citoyens, nous ne serons pas dupes de cette ruse grossière. Comment pourrions-nous croire à la sincérité et au désintéressement de Louis-Napoléon ?

Il parle de maintenir la république, et il jette en prison les républicains ; il promet le rétablissement du suffrage universel, et il vient de former un conseil consultatif des hommes qui l’ont mutilé ; il parle de son respect pour l’indépendance des opinions, et il suspend les journaux, il envahit les imprimeries, il disperse les réunions populaires ; il appelle le peuple à une élection, et il le place sous l’état de siège : il rêve on ne sait quel escamotage perfide qui mettrait l’électeur sous la surveillance d’une police stipendiée par lui.

Il fait plus, il exerce une pression sur nos frères de l’armée, et viole la conscience humaine en les forçant de voter pour lui, sous l’œil de leurs officiers, en quarante-huit heures.

Il est prêt, dit-il, à se démettre du pouvoir, et il contracte un emprunt de vingt-cinq millions, engageant l’avenir sous le rapport des impôts qui atteignent indirectement la subsistance du pauvre.

Mensonge, hypocrisie, parjure, telle est la politique de cet usurpateur.

Citoyens et compagnons, Louis-Napoléon s’est mis hors la loi. La majorité de l’Assemblée, cette majorité qui a porté la main sur le suffrage universel, est dissoute.

Seule, la minorité garde une autorité légitime. Rallions-nous autour de cette minorité. Volons à la délivrance des républicains prisonniers ; réunissons au milieu de nous les représentants fidèles au suffrage universel ; faisons-nous un rempart de nos poitrines ; que nos délégués viennent grossir les rangs, et forment avec eux le noyau de la nouvelle Assemblée nationale !

Alors, réunis au nom de la Constitution, sous l’inspiration de notre dogme fondamental : Liberté-Egalité-Fraternité, a l’ombre du drapeau populaire, nous aurons facilement raison du nouveau César et de ses prétoriens !
Le Comité central des corporations. »


Note : texte affiché entre 21 heures et 22 heures à Paris, le 3 décembre 1851.

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