lundi 1 février 2010

"Les cinq étages" (Béranger, 1830)



Les cinq étages
Paroles : Pierre-Jean de Béranger (1830)

Air : Dans cette maison à quinze ans, ou J'étais bon chasseur autrefois

Dans la soupente du portier,
Je naquis au rez-de-chaussée.
Par tous les laquais du quartier,
A quinze ans, je fus pourchassée ;
Mais bientôt un jeune seigneur
M'enlève à leurs doux caquetages :
Ma vertu me vaut cet honneur,
Ma vertu me vaut cet honneur,
Et je monte au premier étage,

Là, dans un riche appartement,
Mes mains deviennent des plus blanches.
Grâce à l'or de mon jeune amant,
Là, tous mes jours sont des dimanches.
Mais, par trop d'amour emporté,
Il meurt. Ah ! Pour moi, quel veuvage !
Mes pleurs respectent ma beauté,
Mes pleurs respectent ma beauté,
Et je monte au deuxième étage,

Là, je trompe un vieux duc et pair,
Dont le neveu touche mon âme.
Ils ont d'un feu payé bien cher,
L'un la cendre et l'autre la flamme,
Vient un danseur nouveaux amours ;
La noblesse alors déménage.
Mon miroir me sourit toujours,
Mon miroir me sourit toujours,
Et je monte au troisième étage,

Là, je plume un bon gros Anglais,
Qui me croit veuve et baronne,
Puis deux financier vieux et laids,
Même un prélat : Dieu me pardonne !
Mais un escroc, que je chéris,
Me vole en parlant mariage…
Je perds tout, j'ai des cheveux gris,
Je perds tout, j'ai des cheveux gris,
Et je monte encore un étage.

Au quatrième, autre métier :
Des nièces me sont nécessaires !
Nous scandalisons le quartier,
Nous nous moquons des commissaires.
Mangeant mon pain à la vapeur,
Des plaisirs je fais le ménage.
Trop vieille, enfin, je leur fais peur,
Trop vieille, enfin, je leur fais peur,
Et je monte au cinquième étage.

Dans la mansarde, me voilà :
Me voilà pauvre balayeuse !
Seule et sans feu, je finis là
Ma vie au printemps si joyeuse.
Je conte à mes voisins surpris
Ma fortune à différents âges ;
Et j'en trouve encore des débris,
Et j'en trouve encore des débris,
En balayant les cinq étages.



"Etages du monde parisien". Composition de Bertall ; lithographiée par Lavielle pour "Le Diable à Paris" publiée chez Hetzel. Reprise dans L'lllustration du 11 janvier 1845 (p. 293).

2 commentaires:

  1. C'est dommage que dans la lithographie de Lavielle, il n'y ait que 4 étages. Si on veut illustrer la chanson de Béranger" les 5 étages c'est un peu gênant !
    Existe-t-il une lithographie avec les 5 étages !?
    Merci

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Et le rez-de-chaussée ?? On peut relire les paroles tranquillou et y regarder à deux fois et hop ! on a la solution à son petit problème.

      Supprimer