jeudi 21 janvier 2010

Proclamation de Rimini (Murat, 30 mars 1815)


 « Italiens,
L'heure est arrivée où de grandes destinées doivent s'accomplir. La Providence vous appelle enfin à la liberté; un cri se fait entendre depuis les Alpes jusqu'au détroit de Scylla, et ce cri est : l'indépendance de l'Italie. De quel droit des étrangers pourraient-ils vous ravir cette indépendance, le premier droit et le premier bien de tous les peuples ? De quel droit viendraient-ils dominer sur vos plus belles contrées, et s'approprier vos richesses pour les transporter dans des contrées qui ne les ont pas produites ? Quels droits ont-ils de disposer de vos enfants, de les faire servir à leur ambition, et de les conduire à la mort, loin des tombeaux de leurs ancêtres ? La nature aurait donc en vain élevé pour vous les remparts des Alpes ! Elle -vous aurait donc en vain entourés des barrières plus fortes encore, telles que la différence du langage, la diversité des mœurs, et l'invincible antipathie des caractères ! Non ! Non ! Que toute domination étrangère disparaisse du sol italien ! Vous avez été jadis les maîtres du monde, et vous avez expié cette gloire dangereuse par vingt siècles d'oppression. Mettez désormais votre gloire à ne plus avoir de maîtres. Tous les peuples doivent se tenir dans les bornes que la nature leur a assignées; des mers, des montagnes inaccessibles, voilà vos limites. Ne pensez jamais à les franchir; mais repoussez l'étranger qui ne les a pas respectées, s'il ne se hâte de rentrer dans les siennes. Quatre-vingt mille Italiens du pays de Naples entrent en campagne, sous les ordres de leur roi, et jurent de ne prendre aucun repos avant que l'Italie soit délivrée ; et déjà ils ont prouvé qu'ils savaient tenir leurs serments.

Italiens des autres contrées ! Secondez ce dessein magnanime; que ceux qui ont porté les armes les reprennent ; que la jeunesse apprenne à les manier ; que tous les cœurs nobles adressent, au nom de la patrie, des paroles de liberté à tous les Italiens ; que la force du peuple se déploie dans toute son énergie et sous toutes les formes ! Il s'agit de savoir si l'Italie sera libre, ou si elle restera encore pendant des siècles courbée sous le joug de la servitude ! Que la lutte soit décisive, et nous assurons pour longtemps le bonheur de notre belle patrie qui, bien que sanglante et déchirée, est encore l'objet de l'admiration des hommes éclairés de tous les pays. Les peuples dignes d'être régis par des institutions libérales ; les princes qui se distinguent par la grandeur de leur caractère, se réjouiront de votre entreprise et applaudiront à votre triomphe.

L'Angleterre même, ce modèle des gouvernements constitutionnels, ce peuple libre qui met sa gloire à combattre pour l'indépendance et à prodiguer ses trésors pour atteindre ce but glorieux, pourrait-elle ne pas applaudir à vos nobles efforts ? Italiens ! Vous avez été longtemps étonnés de nous appeler en vain ; vous avez peut-être blâmé notre inaction, lorsque vos vœux se faisaient déjà entendre de no us ; mais le temps opportun n'était pas encore arrivé ; nous n'avions pas encore reçu la preuve de la perfidie de vos ennemis.... Il était nécessaire que l'expérience vous éclairât sur les promesses fallacieuses de vos anciens maîtres, lorsqu'ils reparurent au milieu de vous ; vous avez vu combien leur libéralité est vaine et fausse!

Je prends ici à témoin les honnêtes et infortunés Italiens de Milan, de Bologne, de Turin, de Venise, de Brescia, de Modène, de Reggio, et d'autres villes célèbres. Combien de braves guerriers et de vertueux patriotes ont été arrachés au sol paternel ! Combien gémissent dans les prisons ! Italiens, il faut des dédommagements pour tant de maux ! Unissez-vous ; et qu'un gouvernement de votre choix, une représentation vraiment nationale, une constitution digne du siècle et de vous, protègent votre liberté et vos propriétés. Mais il faut que votre courage devienne le gage de votre indépendance. Je somme tous les braves de venir combattre à mes côtés ; j'appelle tous ceux qui ont réfléchi sur les intérêts de leur patrie, à préparer la constitution et les lois qui doivent régir détonnais l'heureuse et indépendante Italie. »

JOACHIM NAPOLÉON. »

 La réplique de Ferdinand 1er (1751-1825) :
 
« Napolitains,
La cause de Murat est perdue : elle était aussi injuste que honteuse. Une ère nouvelle s'ouvre à vous.
Peuples du Samnium, de la Lucarnes, de la Grande-Grèce et des Fouilles, empressez-vous de revendiquer vos droits ! Un étranger les a violés. Pénétré par surprise dans la plus belle partie do l'Italie, il s'est donné le titre de conquérant. Sous ce titre, il s'est permis de dilapider vos fortunes, d'exposer vos enfants et vos frères aux dangers et aux horreurs de la guerre! Qu'espérez-vous d'un soldat fugitif et perfide? L'opprobre, la misère, le désespoir et la mort; voilà les fruits que vous recueillerez de celui qui vous a commandé pour vous conduire à la ruine ! L'homme qui cherche dans le désespoir sa dernière ressource peut-il vous promettre la gloire et la paix ?

Un prince s'avance pour vous sauver. Ses aigles victorieuses ne porteront sur votre territoire que la paix, le calme et la richesse. Vous, enfants dociles des Sabins, venez avec les drapeaux de la concorde, venez au-devant de votre père, de votre libérateur, qui est déjà sous vos murs ! Il n'aspire qu'à faire votre bien, votre bonheur durable. Il travaillera à vous rendre un objet d'envie pour le restant de l'Europe. Un gouvernement stable, sage et religieux vous est assuré. Le peuple sera souverain, et le prince deviendra le dépositaire des lois que dictera la plus forte et la plus désirable des constitutions. Ouvrez vos églises et vos sanctuaires! Votre père y entrera, la tête découverte, pour délivrer de la persécution la religion et ses ministres. Chantez des hymnes de gloire au dieu des armées, qui vous a arrachés de l'oppression et délivrés de votre ruine! Venez, accourez dans les bras d'un père généreux ! Il est prêt à lever la main du pardon. Il ne se rappelle les offenses que pour vous unir, pour vous pardonner. Douterez-vous des promesses d'un père, de celui qui, né au milieu de vous, partage tout avec vous : les lois, les mœurs et la religion ?

Au nom du Congrès, je remonte sur mon trône légitime, et à ce nom même je vous promets en tout amour et pardon.
FERDINAND. »

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