« En théorie, la république est le plus beau des gouvernements ; elle est même le beau idéal des formes politiques. La France trois fois a fait l'essai de la république, en 93, en 48 et le 4 septembre 1870. Or, toujours ces épreuves ont été infructueuses ; jamais les efforts accomplis pour l'établir n'ont pu aboutir. Les deux premières sont mortes, la troisième agonise, que dis-je, elle a péri elle aussi ; car si nous avons encore le mot, nous n'avons déjà plus la chose. Comment donc se fait-il que cet édifice dont la base est si large, dont les lignes sont si pures, dont le couronnement est si splendide ne puisse se tenir debout sur le sol de ma patrie? Plusieurs causes majeures concourent à sa chute rapide.
Premièrement, la république est le drapeau de la canaille. En effet, toujours et partout la canaille est ou du moins se dit républicaine, et quand la vile multitude de tous les partis qui se partagent le pays veut se lancer dans la politique elle arbore le drapeau rouge ou tricolore de la république. Ce qui fait dire à nos ennemis que tous les républicains ne sont pas de la canaille, mais que toute la canaille est républicaine.
Sans doute les Arago, les Lefranc, les Grévy, les Louis Blanc, les Ledru-Rollin, les Victor Hugo sont de fort honnêtes gens; ils renient les Delescluze, les Pyat, les Blanqui, les Flourens, les Vallès et autres. Il n'en est pas moins vrai que tous ces hommes se proclament républicains. On a beau répondre qu'il y a républicains et républicains ; le peuple qui ne distingue pas les nuances qui séparent le républicain honnête du républicain malhonnête s'en va répétant partout : voilà ce que c'est que les républicains !!! […]
Deuxièmement, la république est le signal de la licence. En temps de république, des êtres qui font mal à voir et par les haillons sordides qui les couvrent et par les plaies hideuses qu'ils exhibent, pullulent sur les places et dans les rues. Ils, s'imposent à la charité publique non par leurs prières, mais bien par leurs importunités ; on dirait que la république est un soleil malfaisant qui fait germer des monstres ! […]
Troisièmement, la république est le régime de l'impiété. […] dès que la république est née, les peuples affolés proclament sur le bord de son berceau le divorce radical de l'Eglise et de l'Etat. Ce n'est là, sans doute, qu'une opinion discutable, mais ils vont plus loin; ils décrètent la déchéance de l'Être Suprême, ils déclarent la guerre à Dieu ; il semble que pour les républicains Dieu n'est qu'un ennemi, et que pour eux aussi : « Dieu n'est que le mal ! » Autrefois pour vivre heureuses les nations de l'Europe respectaient le trône et adoraient l'autel ; aujourd'hui elles brisent l'un et profanent l'autre. Aussi, ne travaillant plus nulle part sous le regard du créateur et du maître des empires, quand elles veulent organiser la république : « C'est en vain que travaillent ceux qui la bâtissent. » Ah ! République ! Divine république ! Tour populaire ! Colonne nationale ! Ta cime déjà devrait toucher le ciel, et pourtant, dès que pour te fonder les peuples modernes mettent la main à l'oeuvre, à la première assise, l'ouragan révolutionnaire disperse tes pierres et ton ciment ; car, tes architectes sont des impies et tes constructeurs d'atroces mécréants ! Oui, on dirait que la république est la fille aînée de Satan, et qu'elle a reçu de son père des enfers l'horrible consigne d'insulter l'Eternel ! »
L'abbé de la Tour de Noé, Henri V est-il prêt d'arriver ? Oui ! Toulouse, juin 1871.
intéressant et pathétique à la fois.... On voit bien la peur que la commune engendra contre elle. Cela me rappelle le bouquin "les écrivains contre la commune"....
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